Carnivores de tous les pays, réunissez-vous!

À Québec, la charcuterie le Pied Bleu est tranquillement en train de se faire une belle réputation depuis son ouverture il y a un peu plus d’un an. Après avoir régalé des foodies au premier Foodcamp, servi des brunchs, fourni en boudin quelques bons restaurants de Québec (et avoir gagné une médaille de bronze au 50e concours international de la Confrérie des Chevaliers du Goute-Boudin de Mortagne-au-Perche), l’équipe a décidé que ce n’était pas assez. Ainsi, ils viennent d’ouvrir le premier bouchon lyonnais de Québec, le Bouchon du Pied Bleu.

Dans la tradition lyonnaise, le bouchon est un établissement sans prétention, où règne la bonne humeur, les produits régionaux et le vin qui se boit tout seul. Le Bouchon du Pied Bleu s’inscrit directement dans cette lignée.

Les clients déjà familiers avec les locaux de la charcuterie seront heureux de constater que les locaux ont été agrandis par la prise de possession du commerce voisin. Ainsi, un bonne trentaine de places ont pu y être aménagées. La décoration où le bois domine est sobre et chaleureuse et on a une vue directe vers la cuisine ouverte où trône un rutilant poêle des années 50. La vaisselle d’époque contraste habilement avec les seaux en inox utilisées comme abat-jour.

En jetant un oeil au menu, on est tout de suite mis dans l’ambiance et on sait a quoi s’attendre. La première étape du repas est le saladier lyonnais, une collection de salades froides servies à la bonne franquette, directement dans le saladier et passé de table en table. On a ainsi eu droit a une salade de patates, des champignons vinaigrés, une salade de quinoa, etc. Au final, huit choix étaient disponibles lors de notre passage et, à voir le côté spontané de la chose, on peut s’attendre à ce que cette offre soit bien variée.

En entrée, le gâteau de foie de volaille avec une superbe sauce tomate et le saucisson cuit dans le Beaujolais méritent plusieurs morceaux de pain pour ne rien manquer. Comme quoi les Italiens n’ont pas le monopole de fare la scarpetta… Pour les moins carnivores, Sylvie Isabelle semble avoir bien aimé le gâteau de petits poissons, fait avec des petites sardines lors de notre passage.

Au plat principal, difficile d’ignorer le boudin, ici servi de la manière la plus classique possible, avec un accompagnement de pommes. Ayant déjà goûté leur boudin à plusieurs occasions, je réussis à résister à la tentation pour me lancer vers le foie de porc. Le meilleur plat commandé cette soirée-là fut par contre les croquettes de tête de porc, avec les lentilles. Une chair savoureuse, bien croustillante avec des lentilles encore tout juste craquantes.

Pour arroser le tout, une douzaine de vins choisis par Alexis Hudon, sommelier au Cercle. La ligne directrice est visiblement des vins qui se boivent sans soif, légers et conviviaux. Ainsi, on y retrouve un Morgon, un Fleurie et un Beaujolais-Villages, mais aussi quelques choix dans le Rhône et la Savoie. Le Beaujolais-Villages Cuvée Marylou de Guy Breton allait merveilleusement bien avec toute cette charcuterie. Si vous optez pour un vin blanc, Les Alpes du domaine Belluard ou leur Ayse mousseux sont particulièrement bons.

Si vous voulez rouler de manière plus efficace vers la maison, il est possible de se lancer dans le plateau de fromages de lait cru de la fromagerie Chaput ou dans le fabuleux buffet de desserts. Mon appétit s’est arrêté avant cette étape, mais je trouverai un moyen pour garder un peu de place lors de ma prochaine visite de cette sympathique addition au paysage gastronomique de Québec!

Une mondeuse sauvage

À moins d’être féru de cépages exotiques, il est fort probable que la mondeuse vous soit inconnue. Il s’agit d’un cépage ancien cultivé en Savoie et dans le Bugey, tout près au nord, qu’on retrouve aussi sous le nom de Refosco dans le nord de l’Italie. On retrouve aussi des quantités confidentielles ailleurs sur la planète (Californie, Argentine, Australie), mais de la mondeuse venant de ces contrées lointaines est vraiment anecdotique.

Toutefois, avant la crise du phylloxéra au 19e siècle, ce cépage était le plus cultivé dans la région. Il est presque disparu de l’est de la France sous l’action de ce puceron, mais commence à renaître sous les mains expertes des vignerons locaux qui s’y mettent sérieusement.

Mondeuse de Savoie
Mondeuse de Savoie

Pascal et Annick Quénard (parmi la multitude de Quénard vignerons dans la région) possèdent 8 hectares de vignes, plantées en jacquère, bergeron (l’appellation locale de la roussanne), mondeuse et gamay et font partie de ces vignerons sérieux. Les vignes y sont traitées avec respect, sans irrigation ni pesticides, les vendanges sont faites manuellement et les fermentations sont menées à partir des levures présentes naturellement dans le vignoble. C’est la Mondeuse “La Sauvage” 2010 qui est présentement offerte au Québec.

Dans le verre, cette mondeuse Sauvage déstabilise un peu. Au nez, beaucoup d’épices, des notes de violettes et le fruit prend un rôle de soutien. La bouche est fraîche et c’est cette acidité qui est structurante car les tannins sont présents mais prennent aussi le rôle de second violon. Le lendemain, il s’était transformé et ouvert, et même devenu plus agréable. Il était de manière générale plus équilibré: l’acidité est rentrée dans le rang et le vin s’était légèrement complexifié.

Pour un peu plus de 21$, on est en présence d’un vin qui se bonifiera au cours des prochaines années, tout en vous gardant en dehors de votre zone de confort.