Vignoble de Sainte-Pétronille

Faire du bon vin au Québec

Faire du vin, au Québec, relève du défi, ou selon certains, de l’inconscience même. Il fait froid l’hiver, l’été est court ce qui fait que les cépages traditionnellement utilisés pour faire du vin n’arrivent souvent pas à maturité. De plus, le consommateur québécois n’est pas particuièrement ouvert aux vins du Québec, même si l’achat local est une considération de plusieurs dans leurs achats. Mauvaises expériences? Préjugés? Vin qui ne cadre pas dans leur goûts?

L’exemple de deux vignobles au Québec nous montre qu’il est possible, avec quelques bonnes décisions, de produire du vin de qualité au Québec et de tenter de plaire au consommateur.

Le vignoble de Sainte-Pétronille

Tout près de Québec, sur l’Ile d’Orléans, se retrouve le vignoble de Ste-Pétronille. En sortant du pont de l’Ile, on tourne à droite pour arriver dans un site spectaculaire, surplombant les fleuve et la chute Montmorency. Cinq hectares de vignes, cultivées depuis 2003 par Nathalie Lane et Louis Denault à la sueur de leur front, desquels sont tirés 6 cuvées.

Vignoble de Sainte-Pétronille
Vignoble de Sainte-Pétronille

Le Voile de la Mariée, un assemblage de Vandal-Cliche et de Vidal, est un beau blanc sec et rafraîchissant, qui sans nécessairement être le plus complexe, peut faire bien des heureux cet été, surtout qu’il se détaille que 15.50$. Pour ceux qui recherchent un peu plus d’ampleur, la Réserve du Bout de l’Ile voit un peu de barrique et provient de vignes plus vieilles.

Aussi, le vignoble a planté il y a quelques années des vignes de riesling, la première expérience avec des vignes vinifera pour le domaine. Cette année, avec le printemps hâtif, ce sont les premières vignes dont les bourgeons ont éclos, avant même les cépages hybrides. Le premier millésime de riesling n’est pas encore commercialisé, une toute petite vendange ayant été faite l’année dernière, mais j’ai déjà hâte de voir ce que ça va donner. C’est tout à fait encourageant pour la suite!

Vignoble Carone

Chez Carone, l’objectif est clair: on veut “repousser les limites de la viticulture et la vinification au Canada.” Sangiovese, Nebbiolo, Pinot Noir et Merlot entrent dans la composition de la gamme Venice, tous cultivés au vignoble de Lanoraie, un peu moins d’une heure au nord de Montréal. On y retrouve aussi de plantations de Cabernet Servernyi (un hybride originaire de Russie) et de Frontenac (que le vigneron veut peut-être arracher…)

J’ai eu l’occasion de goûter au Pinot Noir Venice lors du Foodcamp à la fin avril. Servi en complément de la démonstration moléculaire de Frédéric Laplante de La Tanière, il se mariait bien avec la mousse de perdrix enveloppée dans une gelée de cerises. Cet agencement le plaçait définitivement sous son meilleur jour, car il profitatit de la richesse de ce plat. Seul, il manquait alors un peu de profondeur. Si vous voulez juger par vous-mêmes, cette cuvée est disponible pour 36$ à la SAQ.

La cuvée Double Barrel quant à elle est composée de Cabernet Servernyi et de Sangiovese et passe 12 mois en barriques de chêne américain avant d’être transféré pour un 4 mois supplémentaire en barriques françaises. Il en résulte un vin qui prend de la place, avec l’élevage à l’avant-plan et qui laisse peu de place au compromis. Vendu au prix de 55$, le domaine veut faire un “statement” et cherche à démontrer qu’on peut arriver à des résultats intéressants en rouge au Québec grâce aux progrès de l’oenologie moderne. Toutefois, je trouve que ces choix au niveau de la vinification en font un vin technique, hyper-travaillé et qui aurait pu venir d’à peu près n’importe où au monde. Certains l’aiment bien, mais je dos admettre que ce vin n’est pas pour moi.

L’industrie vinicole au Québec est jeune et plutôt désorganisée. Les expériences du vignoble Carone pourront certainement ouvrir les yeux à certains sur le potentiel vinicole de la Belle Province. Les blancs du vignoble de Sainte-Pétronille pourront démontrer le potentiel d’un vigneron qui s’applique à bien comprendre les cartes qu’il a en main. Pour ma part, je me dois de découvrir de manière plus assidue les producteurs d’ici, qui s’efforcent de faire leur traces dans le chemin pas facile de la viticulture nordique, tout en souhaitant que les vignerons qui s’efforcent de respecter leur terroir obtiennent le succès qu’ils méritent.

Foodcamp à Québec – Un succès boeuf…

Samedi dernier, la scène foodie à Québec était toute excitée: c’était le tout premier Foodcamp de Québec. Un foodcamp…?

Je pourrais vous décrire l’activité, mais Caroline “Ze Snob” Décoste l’a fait de manière particulièrement éloquente. Son article est ici, mais revenez ensuite!

L’idée, d’abord lancée par Francis Laplante sur son blog Tranchedepain.com, avait suscité pas mal d’intérêt, mais le fait que 300 personnes puissent passer la journée dans la salle de conférence du Château Laurier à Québec était au-delà de toutes les espérances du comité d’organisation.

Tartare d'émeu de François Blais
Tartare d'émeu de François Blais

Avec François Blais (Bistro B), Frédéric Laplante (La Tanière), Sébastien Camus (Château Laurier – Georges V), Danny St-Pierre (Auguste), Phil Viens (DNA) et Christian Lemelin (Toast!), l’affiche était de haut niveau. Le tout s’est déroulé fidèlement à la devise de l’évènement: Partager, Apprendre, Manger.

En vrac, quelques moments forts de la journée…

La présentation de François Blais pour ouvrir le bal était conviviale, agréable et faisait bien le lien avec les producteurs invités. C’est toutefois la discussion sur l’avenir de la bouffe de rue au Québec qui retiendra l’attention. Puisqu’il possède une belle expérience avec l’établissement du Panache Mobile, il a pu partager les différentes embûches qu’ils ont dû affronter. Conclusion, c’est par la pression populaire qu’on parviendra à faire changer les mentalités. Armé d’un carré jaune moutarde, il n’en tient qu’à nous…!

Danny St-Pierre en pleine action
Danny St-Pierre en pleine action

Le poulet est mon ami, avec Danny St-Pierre, a été un moment fort pour plusieurs. Le chef le plus médiatisé de l’affiche, Danny a su charmer le public avec sa présentation sans prétention et son sens de l’humour contagieux. Il a su nous montrer quoi faire avec un poulet entier, sans pertes et en cuisinant des parties parfois méconnues (faire du gras de cuisson avec la peau, j’ai déjà hâte d’y faire cuire des patates!). L’opinion n’est pas vraiment objective, ayant déjà fait un aller-retour à Sherbrooke uniquement pour aller manger chez Auguste…

Produits de Société Orignal
Produits de Société Orignal

J’ai adoré la présentation de Phil Viens du DNA et Christian Lemelin du Toast! Nous avons eu droit à un cours de foie gras 101 de la part de Chef Lemelin, avec une pédagogie et une simplicité désarmante. Par contre, j’en retiens le thème de la présentation, construite autour des produits de Société Orignal. Le sirop d’érable le “Remonte-Pente” aurait pu être bu à la bouteille tellement il était bon…

Au final, une journée fort réussie, qui a donné le goût aux 300 participants de revenir l’année prochaine. Je vais certainement faire la file pour obtenir des laissez-passer pour le Foodcamp Québec 2013!

Le Terroir de Sainte-Foy

Samedi midi, lors d’une visite à la SAQ du complexe Jules-Dallaire où se trouve la succursale Signature de Québec, j’ai pu assister à un petit regroupement de producteurs et d’agences visant à promouvoir les produits du terroir en vente à la SAQ.

Boulevard Laurier, Google StreetView
Boulevard Laurier, Google StreetView

Cette opération charme auprès des consommateurs québécois est nécessaire afin de souligner le transfert des produits du terroir suite à la fermeture de la succursale du Château Frontenac le 16 avril dernier. Selon la société d’état, les ventes n’étaient pas au rendez-vous, le bail était trop cher et le local, situé dans un demi sous-sol, n’était pas vraiment adapté.

Au point de vue strictement commercial, la décision peut se justifier, la succursale bénéficierait probablement d’une mise à jour qui la rendrait plus “performante” selon les critères de la SAQ. Toutefois, le portrait n’est pas nécessairement aussi net qu’annoncé, puisque le représentant de Rézin m’affirmait cette succursale était la meilleure vendeuse au Québec pour le Cryomalus et que contrairement à tous les autres points de vente, les ventes étaient constantes sur toute l’année.

Toutefois, au-delà du strict point de vue économique, je crois qu’il est du devoir de la société d’état d’offrir une vitrine digne de ce nom aux produits d’ici. À Québec, une vitrine digne de ce nom signifie avoir une présence forte dans le principal pôle touristique de la ville, le Vieux-Québec. Le touriste de passage ne se tapera certainement pas 30 minutes d’autobus pour aller dans un no-man’s-land touristique et ce n’est certainement pas la petite SAQ Classique sur la rue St-Jean qui pourra prendre le relais.

Dans l’état actuel des choses, le consommateur qui arrive à Québec en entendant parler du cidre de glace québécois voit son choix particulièrement limité, s’il est même capable d’en trouver…

Un petit événement avec des producteurs à Sainte-Foy, c’est bien sympathique, mais ce n’est pas ça qui va régler à la source le problème causé par la fermeture de la succursale du Château Frontenac. Il est essentiel que la SAQ pense dès maintenant au retour des produits du Terroir car je suis certain que dans peu de temps, elle se rendra compte que la décision de déménager cette bannière loin de leur principal public cible est une aberration.

Le Camp du Goût et le Camp de la Bouffe

Le printemps prochain sera occupé, avec deux évènements qui s’annoncent particulièrement intéressants.

Dans un premier temps, le 27 et 28 avril, j’assisterai à la toute première édition du FoodCamp de Québec. Initié par Francis Laplante du blog Tranchedepain, le Foodcamp se veut une journée d’ateliers et de découvertes culinaires.

Pour l’instant, le programme détaillé n’est pas connu, mais on annonce déjà le concept de trios composés d’un producteur d’aliments de base, d’un transformateur (restaurateur, chef, charcutier, etc.) et d’un producteur de boissons, alcoolisées ou non. Avec un peu de créativité, chaque trio devra mettre ses produits et son imagination en valeur plutôt que de bêtement passer au travers de la gamme de produits. J’aime bien cette idée et j’ai hâte de voir comment elle sera mise en pratique!

Les 100 premiers billets pour le Foodcamp sont en vente depuis hier au coût de 35$ en prévente pour passer à 45$ lors de la vente régulière. La journée se déroule au Château Laurier, au coeur du Vieux-Québec. Le lieu est particulièrement bien choisi puisque j’y ai admirablement bien mangé en décembre dernier lors du party de Noël du bureau…!

Une virée en Virginie

La fin de semaine suivante, c’est dans la région de Washington que je vais me trouver, pour la quatrième édition de Tastecamp. Après une édition dans les Finger Lakes et une autre dans le Niagara, c’est le nord de la Virginie qui sera cette fois-ci investi par des blogueurs vinicoles de tous azimuths, afin de découvrir cette région méconnue.

Pour ma part, je n’ai jamais bu de vins provenant de cet état et la SAQ compte présentement deux vins de la Virginie. La découverte sera donc maximale et j’ai aussi bien hâte de revoir des visages connus, provenant des éditions précédentes. Vous en entendrez parler sur ce blog c’est certain!

Deux vins blancs atypiques

On lit souvent que les fromages s’agencent mieux avec les vins blancs. L’accord est même moléculairement correct selon ce qui est présenté par François Chartier dans Papilles et Molécules. Ainsi, lors d’un vin et fromages entre amis il y a quelques semaines, nous avons pu valider cette affirmation avec deux vins totalement différents.

Château Pajzos Tokaji Furmint 2007
Château Pajzos Tokaji Furmint 2007

Tout d’abord, le Furmint Tokaji Château Pazjos 2007 présentait sa robe jaune pâle aux invités. Il s’agit d’un vin blanc sec, provenant d’une région réputée pour ses vins liquoreux, au nord-est de la Hongrie. On laisse ici fermeter le furmint jusqu’à ce que le sucre soit totalement transformé en alcool, puis le vin est vieilli en cuves inox (fort probablement, pour une durée inconnue) avant d’être mis en bouteilles.

Le résultat est un bon petit vin, pas très complexe, d’un équilibre certains. Pour 13,70$, il s’agit d’un très bon rapport qualité-prix et venait complémenter les fromages plus doux tels le chèvre frais et le jeune gouda.

[rating:2.5/5] – Code SAQ: 860668 – 13,70$

 

Servi en parallèle, le Domaine Les Brome Vidal Réserve 2006 avait été choisi comme le vin déroutant de la soirée. Personne n’avait d’expérience préalable avec des vins blancs secs du Québec, encore moins avec le Vidal.

Le Vidal Blanc est un cépage hybride français-américain, cultivé aux États-Unis et au Canada et qui est particulièrement bien adapté au climat nordique. Récolté très tard à la mi-novembre, le Réserve Vidal est fermenté à basse température sur sa lie, directement en barriques neuves américaines, puis bâtonné pendant trois mois pour maintenir la lie en suspension.

Il en résulte un vin au nez extrêmement puissant, dominé par les notes boisées de la barrique. On retrouve certes en appui des notes florales, de fruits exotiques et de miel, mais on sent la main du vigneron à l’avant-plan. La complexité est présente, à la fois au nez comme en bouche et la longueur est bien respectable.

Avec ce caractère “In your face”, on ne peut pas rester indifférent face à ce vin. Bien qu’il ne soit pas mon type de vin préféré (je préfère un peu plus de subtilité et un peu moins de boisé), il est ressorti gagnant de cette vague pour sa fougue et son caractère. À table, il sait tenir tête aux fromages avec plus de corps, tel un Oka ou un St-Paulin. L’accord est aussi surprenant avec un fromage bleu plutôt modéré.

[rating:2.5/5] – Code SAQ: 10919707 – 22,45$