Du Beaujolais nouveau (et d’autre moins nouveau!)

Le 3e jeudi de novembre, année après année, les vignobles du Beaujolais mettent en vente du jus de raisin embouteillé sa fermentation à peine terminée et le distribuent aux quatre coins de la planète. Le phénomène Beaujolais Nouveau, est toutefois placé sous le signe d’un millésime particulièrement difficile pour les vignerons.

En effet, les épisodes de gel et de grêle au cours de la saison ont eu pour effet de couper le volume de raisin produit d’environ 50%. Conséquence? Les vignerons devront probablement hausser les prix du vin qu’ils ont réussi à produire afin d’arriver à un bilan pas trop négatif au point de vue financier. Malgré ça, certains domaines seront quand même en difficulté financière après cette demie-récolte.

Au Québec, le vin nouveau est en régression constante et rapide. De 40 000 caisses commandées en 1999, la SAQ passe cette année à un peu plus de 3000 caisses, ce qui en dit beaucoup sur l’intérêt des Québécois sur ces vins. Toutefois, lors de mon passage à Tokyo la semaine dernière, j’ai vu des gens qui faisaient la file pour placer leur réservation pour mettre la main sur du Beaujolais Nouveau cette semaine…

Cette année, la SAQ a importé 400 caisses de Nouveau de Jean-Paul Brun, un des producteurs réputés de la région. Pour les commentaires de dégustation, on se tourne vers Karyne Duplessis-Piché de La Presse qui semble avoir bien aimé cette cuvée.

Pour les autres qui veulent découvrir le côté plus sérieux du Beaujolais, on sort une vigntaine de dollars et on recherche en succursale les vins de Jean-Paul Brun, du Château Thivin, de Dominique Piron ou du Domaine de Vissoux. En importation privée, on se commande un carton des vins P-U-R ou le Clos de la Roilette chez Les Vieux Garçons ou on se gâte avec le Morgon de Descombes chez Rézin.

Un Fleurie qui disparaît trop rapidement

Parfois, lorsqu’on ouvre une bouteille pour accompagner le souper, je me dis que j’ai envie de voir comment il va évoluer sur quelques heures, jusqu’au lendemain. Sur deux jours, on a souvent une meilleure idée de ce que le vin a dans le corps: le nez prend de l’ampleur et se complexifie, la bouche, lorsque bien équilibrée reste droite et aucun élément ne prend le dessus sur les autres.

Parfois, malgré toutes nos bonnes intentions, on cligne des yeux et la bouteille est vide. C’est tout à fait ce qui s’est passé cette semaine après avoir ouvert une bouteille de Fleurie Les Garants 2009 de Pierre-Marie Chermette. Pour documenter, il faut même aller extirper la bouteille vide du bac de recyclage…

Les crus de Fleurie sont traditionnellement reconnus pour leur délicatesse et leur féminité. Moulin-à-Vent, tout juste à côté, offre typiquement des vins plus structurés et un peu plus imposants. Oui, il peut y avoir de la structure dans le Beaujolais. La parcelle des Garants, située tout près de cette dernière, offre le meilleur des deux appellations.

Du fruit rouge à revendre, comme dans plusieurs Beaujolais, mais ça ne s’arrête pas là. Des fleurs et une petite pointe d’épice viennent complexifier le nez. En bouche, l’ampleur de 2009, millésime historique dans la région, se fait sentir. Malgré toute la générosité du fruit, il y a toujours cette acidité rafraîchissante qui garde le tout en équilibre. Cette grande sapidité a fait disparaître la bouteille en moins de deux, nous laissant nous demander pourquoi j’en avais pas acheté plusieurs exemplaires

Certes, pour plusieurs, payer 26$ pour un Beaujolais frôle l’hérésie. Effectivement, ce n’est pas donné, mais à ce prix, on est parmi ce qui se produit de mieux dans cette région du monde. À Bordeaux ou ailleurs, pour 26$, on est proche du top des appellations…? Poser la question, c’est y répondre…

Avis aux intéressés: au moment d’écrire ces lignes, il n’en restait que 2 dans toute la province… Toutefois, le Fleurie Poncié 2010 est un peu plus disponible. Quant au Brouilly 2010 qui lui est abondant, il m’a un peu déçu, un peu trop bonbon à mon goût. Préférez-lui le simple Beaujolais Les Griottes et prenez le 6$ économisé pour acheter une belle charcuterie!

Vous aimez le Brouilly de Duboeuf? Essayez ça pour voir!

Brouilly de Georges Duboeuf
Brouilly de Georges Duboeuf

Parmi la liste des vins les plus vendus au Québec, on retrouve, année après année, le Brouilly de Georges Duboeuf. Sa bouteille allongée fait partie des classiques pour célébrer une occasion spéciale avec quelqu’un qui affectionne les vins légers. En 2010, ce Brouilly représentait plus du tiers des ventes de tous les Beaujolais vendus par la SAQ.

Personnellement, je ne suis pas un grand fan de ce vin. Il est certainement bien fait, mais je trouve qu’il est un peu trop générique et qu’il manque de personnalité. Une bouteille ouverte récemment a confirmé mes impressions, même dans le millésime d’exception qu’est 2009 dans le Beaujolais: un nez sur les fraises avec quelques notes d’épices, un peu de minéralité et une longueur correcte, mais le tout reste relativement simple.

Pour les amateurs de Brouilly de Duboeuf curieux, voici d’autres Beaujolais qui méritent les 20$ qui auraient été dépensé sur l’emblématique quille.

Fleurie Poncié 2009, Domaine du Vissoux
Fleurie Poncié 2009, Domaine du Vissoux

Il faut tout d’abord goûter ce qui sort de chez Pierre-Marie Chermette, du Domaine de Vissoux. Sous la barre des 20$, le Beaujolais Les Griottes est tout à fait recommendable. Le profil est clairement Beaujolais, mais son caractère est bien plus affirmé que le Duboeuf. J’ai découvert ce producteur grâce à la formidable entrevue d’Eric Asimov dans la revue Cellier, que je vous invite à lire pour découvrir le personnage s’il vous est encore inconnu. On retrouve deux cuvées de Fleurie, dont il est question vers la fin de l’entrevue, en vente à la SAQ. Le Poncié mérite de dépasser la barre des 20$ tout légèrement et de passer son tour lors d’un escapade au Tim Hortons. Au moment d’écrire ces lignes, il en reste quelques unes dans le réseau, c’est un vin qu’il ne faut pas laisser passer.

Si vous magasinez à la SAQ Dépôt, vous avez probablement croisé sur votre chemin le Brouilly Sous les Balloquets de Louis Jadot. Un nez bien expressif de petits fruits rouges, des tanins souples et aimables, à boire à grandes lampées assez frais, sur la terrasse avec des charcuteries. Avec le rabais offert par la SAQ Dépôt, il revient à 17$, amplement suffisant pour aller au Tim Hortons le lendemain…

Finalement, le Beaujolais l’Ancien de Jean-Paul Brun, un des piliers de la renaissance du Beaujolais mérite notre attention. Faites de vieilles vignes, les parcelles servant à l’élaboration de l’Ancien sont situées un peu partout sur le territoire du Beaujolais, d’où l’appellation générique. L’attention portée au résultat final, avec une agriculture dans le respect de la nature et un traitement minimaliste dans le chai (peu de soufre ajouté), donne ici un vin de soif, qu’il sera agréable de boire légèrement rafraîchi, sur une terrasse avec des charcuteries et des bons amis.

Au final, ce qu’il faut retenir de cet article est qu’il ne faut pas hésiter à être curieux et sortir des sentiers battus. Je suis certain qu’on pourrait écrire un article similaire pour le Ménage à Trois, la coqueluche des Québécois en 2011.

L’ami Marcel

Marcel Lapierre
Marcel Lapierre
Lorsqu’on tape “Marcel Lapierre” dans Google, le résultat pourrait déprimer le plus optimiste. Outre le site officiel du vignoble, les 5 autres liens sont principalement composés d’articles écrits suite au décès du vigneron en octobre dernier. Google Images est pas mal mieux, avec des imges de bon vivant, de vin et de belles vignes.

C’est toutefois dans la bouteille qu’on a l’impression de rencontrer Marcel Lapierre pour vrai. N’ayant malheuresement pas eu la chance de rencontrer ce vigneron, je ne peux que me fier sur les commentaires lus sur internet. On semble toutefois y trouver toute la joie de vive propre au personnage. C’est ce qui ressort de l’expérience de ce vin: généreux, honnête et fier de son terroir. Dans la bouteille, on a affaire à un grand vin de soif, qu’on essaie de ne pas boire trop vite car on sait qu’il va continuer à se découvrir avec le temps.

Pour ceux qui ne connaissent pas Marcel Lapierre, il s’agit d’une figure de proue du mouvement du vin nature, composé de jus de raisin sans plus (sans addition de soufre, traitement biologique dans le champ, levures indigènes lors des vinifications, etc.). Pour connaître le personnage, difficile de faire mieux que l’article d’Eric Asimov dans le New York Times ou cette sympathique interview avec Mathieu Lapierre, qui dirige maintenant le domaine, faite par réZin, l’agence qui importe ce vin au Québec.

Le premier arrivage du Morgon 2009 à la SAQ, quelques jours après la disparition de M. Lapierre dans le cadre d’une opération Cellier, s’est écoulé en moins d’une journée. Ceux qui n’ont pas eu la chance de mettre la main sur ce vin d’exception auront une deuxième chance la semaine prochaine alors que 250 caisses seront mises en vente à la grandeur de la province. Gageons que ces bouteilles disparaîtront aussi très rapidement, mais peu importe le prix, il s’agit d’une chance unique de goûter à un top Beaujolais…. Vous pouvez m’en laisser d’autres bouteilles?

Du Beaujolais nouveau…

Le Beaujolais Nouveau est arrivé!
Le Beaujolais Nouveau est arrivé!
C’est demain qu’est mis en vente l’arrivage 2009 de Beaujolais Nouveau. Comme à chaque mois de novembre, les producteurs du Beaujolais expédient par avion des caisses de leur vin pour la mise en vente le 3e jeudi de novembre. Et comme à chaque année, mon site reçoit des visites provenant de recherches sur Google avec comme mot clé Beaujolais nouveau saq 2009, ou une combinaison de tout ça…

Les amateurs de Beaujolais Nouveau seront déçus d’apprendre que seulement 3 vins nouveaux feront partie de l’offre de la SAQ cette année, deux Beaujolais et un Sangiovese Novello, d’Émilie-Romagne, totalisant 3600 caisses pour la grandeur de la province. La SAQ réagit ainsi à la baisse d’intérêt des consommateurs face à ce type de vins, constatée depuis quelques années déjà.

Pour ma part, bien peu d’intérêt pour ce vin nouveau, puisqu’il cadre mal dans mes goûts. Je vais peut-être en acheter 1 pour la curiosité, mais sans plus. Y’a-t’il parmi les lecteurs des amateurs de Bojo Nouveau? Si oui, pourquoi est-ce un vin que vous aimez?