Domaine du Nival – Cuvée expérimentale Pinot Noir 2014

Il y a de ces vins qui viennent vous chercher, qui vous transportent et pour lesquelles les descriptions ne sont pas adéquates. J’ai eu le privilège de mettre la main sur une bouteille de la Cuvée expérimentale de pinot noir du Domaine du Nival et je le classe sans hésitation dans cette catégorie.

En se rendant au domaine, on quitte l’autoroute 20 vers St-Louis-de-Yamaska et on traverse une plaine parsemée de fermes laitières. Au détour d’un chemin, on découvre un des rares coteaux de la région, qui surplombe la rivière Yamaska et la vigne apparaît. Le domaine du Nival est une destination, on n’y passe pas par hasard.

C’est là que le duo père-fil de Denis et Matthieu Beauchemin ont décidé de planter en 2012 des vignes de Vidal, Pinot Noir, Gamaret (un cépage d’origine suisse) et quelques curiosités québécoises comme de l’Albariño, de la Petite Arvine et du Gamay. Agriculture et vinification en biodynamie, travail au champ “à bras”, attention au détail.

Dans le coteau, le pinot noir et la gamaret. En contre-bas, non loin de la rivière, le vidal. Cachée derrière une petite rangée d’arbre, dans une pente bien abrupte, l’albariño (et un des coups d’oeil les plus spectaculaires). En haut, près du chai, la petite parcelle expérimentale…

Le domaine du Nival à l'automne (Source: http://nival.ca)
Le domaine du Nival à l’automne. À gauche, le pinot et le gamaret. Au fond, l’albariño et devant, le vidal. (Source: http://nival.ca)

Au cours des dernières années, le domaine a eu particulièrement bonne presse et leurs cuvées s’envolent comme des petits pains chauds. Celle-ci, malgré le fait que les vignes ne soient âgées que de deux ans, le fruit est éclatant, malgré des signes d’évolution bien marqués. J’ai donc dans mon verre un beau pinot noir à son apogée, vivant et vibrant.

Le but ici n’est pas de vous écoeurer avec une bouteille qui n’est pas en vente, mais plutôt de partager mon enthousiasme et mon émotion devant ce qui est, à mon sens, parmi les meilleurs vins produits au Québec.

Le domaine va mettre en vente dans les prochains jours ses cuvées 2016 des Entêtés, un assemblage de pinot noir et de gamaret et de Matière à Discussion, un vidal élevé en fûts. Même si le millésime 2016 a été difficile chez eux à cause d’une violente attaque de cicadelles, limitant la photosynthèse (et le taux de sucre des raisins) en fin de saison, le vin que j’ai goûté au domaine lors de mon passage en juillet est terriblement délicieux.

Si j’étais vous, je ne niaiserais pas.

Du Priorat, hors des rouges

Dans les collines du Priorat, il faut se forcer pour trouver autre chose que du vin rouge. On y vantera volontiers les mérites des vins à base de grenache et carignan élevés sur les sols de llicorella, le reste ayant souvent l’air d’une arrière pensée…. “Ah oui, on fait un peu de blanc aussi! Seriez-vous intéressés à y goûter?” m’a-t’on demandé à plus d’une reprise lors d’Espai Priorat à la fin mai. Pourtant, les blancs du Priorat est parmi ce qui m’a le plus enthousiasmé lors de mon séjour dans la région.

C’est un peu moins de 6% de la superficie totale du vignoble du Priorat qui est planté en cépage blancs. On y retrouve principalement du grenache blanc et du maccabeu, parfois accompagné de Pedro Ximénez. Provenant du champ gauche, on a quelques gens qui cultives du picapoll (oui oui, le cépage connu sous le nom de piquepoul dans le sud de la France) et un peu de chardonnay, qui n’y fait pas très bien.

Au niveau du profil, ils reflètent bien les coteaux ensoleillés d’où ils sont issus. On pourrait les comparer aux blancs du Roussillon, tout juste de l’autre côté des Pyrénées: avec un intense fruité et une présence en bouche large. Ce ne sont pas des vins blancs qui sont construits autour de l’acidité comme on retrouve dans des contrées plus nordiques. Toutefois, la llicorella qui forme la base géologique de la région permet de garder le tout avec une bonne acidité, malgré la chaleur ambiante.

On n’en retrouve que 4 Priorat blancs sur les rayons de la SAQ, dans le meilleur des cas les vins ci-dessus sont disponibles en importation privée. Si vous trouvez un exemplaire du Barranc dels Clossos de Mas Igneus dans une succursale près de chez vous (ils se font rares!), n’hésitez pas, il s’agit d’une belle introduction aux blancs de la région. Le Onix Classic de Vinicola del Priorat m’avait semblé quelque peu générique lorsque dégusté là-bas… Il ne s’agit pas d’un mauvais vin, mais il n’est pas aussi excitant que celui de Mas Igneus. Quant au Nelin de Clos Mogador, il s’agit d’un vin hors normes, composé de près d’une dizaine de cépages, avec un peu de macération pelliculaire, etc. Un très beau vin, mais pas nécessairement représentatif de ce qui se fait dans la région.

Pour ce qui est de mes autres découvertes, le Vi Ranci – un vin oxydatif habituellement à base de grenache, un peu comme les banyuls, et les Vermuts locaux, il faudra se rendre sur place, puisque ceux-ci ne sont à peu près pas exportés. On y est très collé à la notion de terroir, de savoir faire des Hommes qui font ce qu’ils peuvent avec ce que la nature leur offre.

Déguster dans un abbaye millénaire: check.
Déguster dans un abbaye millénaire: check.

Si c’est ce que ça vous prend pour aller visiter le Priorat, sautez dans un avion à destination de Barcelone plus tôt que tard, la région vous le rendra bien.

10 bons achats sous 15$

La catégorie des vins de moins de 15$ est parmi les plus difficiles à naviguer, car les vins très bon côtoient les vins industriels qui offrent un intérêt limité. Pour s’y retrouver, voici 10 suggestions qui vous feront bien boire pour moins de 15$!

Des vins blancs (et un rosé!)

Je trouve qu’il est généralement plus facile de trouver satisfaction dans cette échelle de prix en blanc qu’en rouge. Je vais rechercher un vin qui est bien sec et dont la fraîcheur est à l’avant-plan.

5 vins blancs sous 15$ (Photos: saq.com)
5 vins blancs sous 15$ (Photos: saq.com)
  • Adega de Pegões Colheita Seleccionada – 12.60$: À base de chardonnay et complété par l’arinto et l’antao vaz, ce blanc amène à table tout le soleil des environs de Lisbonne. Un sucre résiduel un peu plus important que j’aurais tendance à privilégier, mais on est ici du bon côté de la mince ligne et on remarque surtout un belle texture en bouche.
  • Bù Splendido – 13.30$: Les vins élaborés par Jessica Harnois ont généralement fait bonne figure lorsque servis à l’aveugle, principalement le blanc. Assemblage de chardonnay et de fiano élaboré dans les Pouilles, il est bien droit et offre un bon rapport qualité prix, qui devient un no brainer si la SAQ est fermée!
  • Château Pajzos Tokaji Furmint 2015 – 13,45$: Servi à l’aveugle, on le plaçait à mi-chemin entre un chenin blanc de la Loire et un sauvignon blanc au profil un peu plus moderne. Un petit côté mielleux, une acidité rafraîchissante et un dépaysement garanti, gracieuseté de ce vin hongrois.
  • Domaine Tetramythos Roditis 2016 – 14,95$: Composé entièrement de roditis certifié bio, ce vin est dominé par des notes florales avec une minéralité bien présente. Assurez-vous de ne pas le servir trop froid et sortez-le une quinzaine de minutes du frigo avant de le servir, il vous le rendra bien!
  • Le Pive Gris – 13.95$: Mon rosé par défaut au cours de l’été. Sec, rafraîchissant, gourmand à souhait (et bio en prime!), on est loin des rosés trop sucrés qu’on trouve trop souvent à ce prix. Un verre de Pive à la main, on souhaite plus que jamais l’arrivée du beau temps.

Des vins rouges

Dans les vins rouges de cette gamme de prix, je recherche principalement un fruité franc et, de manière générale, privilégie la générosité amenée par le soleil plutôt que par l’élevage, qui prend plus souvent qu’autrement trop de place à mon goût. En voici 5 qui donnent beaucoup de fruit pour les dollars investis!

5 vins rouges sous les 15$ (Photos: saq.com)
5 vins rouges sous les 15$ (Photos: saq.com)
  • Chapoutier Marius – 13.55$: Un assemblage de grenache et Syrah décidément sudiste et ensoleillé qui ne se prend pas la tête. Le fruit est à l’avant plan comme il se doit!
  • Château la Lieue – 13.25$: Un cru élevé en bio du sud de la France, qui offre toujours une belle qualité et plaira à ceux qui cherchent un fruit bien mûr dans leur vins. Issu d’un assemblage de Granache, Syrah, Cabernet-Sauvignon et Carignan et élevé sans voir de bois, le fruit est pur et éclatant.
  • Hacienda Araucuno Syrah Reserva – 9.60$: Sous la barre des 10$, celui-ci est difficile à battre. Une syrah bien juteuse provenant d’une propriété de François Lurton au Chili, avec un élevage discret qui rehausse les notes épicées de la Syrah. Bien fait, sans se casser la tête ni le porte-feuille.
  • Château Ksara Clos St-Alphonse 2013 – 9,65$: Tout droit de la section Autres Pays à la SAQ, le Clos St-Alphonse montre de quoi le Liban peut se chauffer avec cet assemblage de Syrah et de Cabernet-Sauvignon. Il est la preuve que même les vins d’entrée de gamme peuvent vieillir, puisque c’était le 2007 qui était offert en succursales jusqu’à récemment.
  • Poças Coroa d’Ouro 2011 – 12.35$ (ou 23,40$ pour le magnum!): Provenant des terrasses ensoleillées de la vallée du Douro, le Coroa d’Ouro offre une belle introduction aux vins de cette région. Il fera un malheur avec les grillades sur le patio par une soirée d’été qui s’étire.

Quelques vins du Niagara

La semaine dernière, j’ai eu l’opportunité d’assister à un cours d’introduction aux vins du Niagara donné à l’École Hôtellière de la Capitale par l’ami Alain Laliberté. Ayant visité la région en 2011 dans la cadre de Tastecamp et de nouveau en 2015, il faisait bon de se replonger dans la région et avoir un autre point de vue sur celle-ci.

Au menu, 6 vins servis à l’aveugle offrant un portrait assez fiable de la région en commençant par deux rieslings, un cépage qui offre de très beaux résultats dans la région. Les bouteilles ont été ramenées d’Ontario par Alain, certaines sont disponibles au Québec, mais les quantités sont souvent plus limitées et il faut chercher un peu plus fort…

Carte des appellations dans la Niagara
Carte des appellations dans la Niagara

Le premier est presque transparent et offre un nez classique de pomme verte et de lime, sans être particulièrement complexe. C’est en bouche où ça se gâte, qui est plutôt disjointe (une attaque d’acide qui disparaît pour faire place à une finale sucrée). Je m’attendais à avoir 12-15 g/L de sucre résiduel, mais c’était plutôt 21 g/L…! Ça va prendre pas mal de soleil et une piscine pour que le Fielding Mise du Domaine 2015 trouve sa vraie place.

Le second était pas mal plus dans ma palette. Avec son aspect plus foncé, il annonçait déjà un peu plus de concentration. Le nez est plus riche et mûr – encore sur les notes classiques du riesling – avec un côté floral qui ajoute une belle complexité. En bouche, le sucre est beaucoup mieux intégré et on retrouve une belle petite amertume qui appelle tout de suite une autre gorgée. Un riesling de table de haut vol, que ce June’s Vineyard 2014 de 13th Street.

Place ensuite à un chardonnay, qui ne m’a pas particulièrement plu. On est encore une fois dans les notes classiques du cépage, dans son style boisé – qui prend tout juste un peu trop de place à mon goût. Heureusement, la fraîcheur de la région vient quelque peu sauver la mise et remettre le Tawse Quarry Road Chardonnay 2012 sur les rails. Il ne m’a pas semblé terriblement distinctif et, pour les 35$ demandés à la LCBO, je crois avoir un peu plus de plaisir ailleurs.

On passe ensuite aux rouges, en commençant par un gamay particulièrement joli. Poivre et fraises au nez, avec une bouche toute en fraîcheur qui invite à replonger dans le verre plus tôt que tard. Ce n’est pas le gamay le plus complexe qu’on pourra trouver sur le marché, mais le verre s’est vidé en moins de deux. Ce 13th Street Gamay Noir 2015 s’en est particulièrement bien tiré, bravo encore à Jean-Pierre Colas.

Barriques de pinot, chez Tawse.
Barriques de pinot, chez Tawse.

Le nez du vin suivant ne ment pas: c’est du pinot. Difficile de faire plus classique, avec les petits fruits rouges et une petite note herbacée particulièrement plaisante. La bouche est quelque peu austère et me semble en continuité avec l’esprit bourguignon. C’est frais et on reste loin du côté moderne vers lequel ce vin aurait facilement pu dériver. Le Tawse Pinot Noir Grower’s Blend 2011 (2012 à la SAQ) est un des vins qui m’a le plus plu de toute la soirée.

Finalement, dernier détour du côté de chez Tawse avec le Cabernet Franc Grower’s Blend 2012, encore une expression particulièrement typique du cépage. La légère verdeur caractéristique du cabernet franc au nez n’est pas du tout présente en bouche, où on retrouve une belle trame tannique et un fruit éclatant et bien mûr. Bien fait et apprécié d’une bonne partie de la classe, j’ai préféré la fraîcheur et l’authenticité des deux vins précédents dans la vague.

Je ne le dirai pas assez, les vins ontariens offrent selon moi une valeur insoupçonnée et, de manière générale, significativement au-delà du prix demandé. Alors que la dégustation Somewhereness de février dernier a prouvé que les vins du Niagara et de Prince Edward County peuvent compétitionner au plus haut niveau, celle-ci montre que la province s’en tire généralement très bien dans le milieu de gamme aussi. Si seulement la SAQ pouvait en arriver à la même conclusion et augmenter sa sélection ou la RACJ nous laisser commander du vin directement depuis les vignobles de nos voisins…!

Mas Igneus Barranc dels Clossos Priorat 2014

À un peu moins de deux heures de Barcelone se trouve la région du Priorat, qui s’est rapidement forgé une réputation enviable sur la scène internationale pour la qualité de ses vins rouges à base de Carignan et Grenache. Or, les vins blancs provenant de la région sont pratiquement inexistants, formant que 6% de la superficie plantée.

On retrouve présentement sur les tablettes de la SAQ le Barranc dels Clossos 2014, de Mas Igneus. Il s’agit d’un vin élaboré à base de Grenache Blanc à 80% et, selon si on fait confiance à la contre-étiquette ou au site web du producteur, de Pedro Ximinez ou de Maccabeu pour les 20% restants… (J’ai écrit au domaine pour avoir la vérité…!)

Le vin est fermenté an cuves inox, avec 4 mois d’élevages sur lies. Un faible pourcentage (10%) fait un court passage d’un mois dans des vieilles barriques d’acacia.

Dans tous les cas, on est en présence d’un vin qui respire le soleil qui baigne les côteaux catalans. C’est un vin généreux et ample, qui a fait un malheur avec un poulet laqué au miso et au miel. À la fois fruité et floral, le Grenache Blanc amène aussi une légère amertume en fin de bouche qui invite à prendre autre autre gorgée. Un vin bien réussi qui se fera certainement une place de choix dans ma liste d’achats.

J’ai bien hâte de découvrir la région du Priorat à la fin-mai, puisque je serai sur place pendant quelques jours dans le cadre d’Espai Priorat 2017. J’ai hâte!!