Le comté de Prince-Edward fait tourner bien des têtes dans le monde vinicole depuis quelques années. Cette presqu’île s’avançant dans le lac Ontario entre Kingston et Belleville est en train de se bâtir une belle réputation principalement pour la qualité de leur chardonnay et de leur pinot noir, avec en tête de liste des producteurs comme Norman Hardie et Closson Chase.
C’est sur la route Closson qu’on retrouve le petit vignoble de Bruno François et Jens Korberg. Ce coteau de deux hectares orienté sud-sud-est est planté avec du pinot noir et du cabernet franc, à une densité particulièrement élevée pour Prince Edward County. Cette densité a pour conséquence de forcer les racines de la vigne en profondeur et, parce que l’espace est trop restreint pour y amener de la machinerie, de tout faire manuellement. Ils ont choisi de produire leur vin hors de l’appellation VQA – ce qui leur a amené quelques petits soucis avec des fonctionnaires zélés – principalement pour avoir la latitude nécessaire pour faire leurs propres choix de culture.
Dans le verre, les amateurs de Bourgogne seront comblés car le vin est bâti sur les notes de petits fruits rouges acidulés, fraises, cerises et canneberges croquantes et acidulés, à la fois au nez et en bouche. Le nez est particulièrement envoûtant et ajoute une composante florale et légèrement épicée. Classe et finesse sont les mots que je retiendrais. Il faut aimer avoir une certaine dose d’acide dans son pinot, à mille lieux de ce qu’on peut retrouver plus au sud.
Pour s’en procurer, c’est au vignoble que ça se passe. Oui, c’est un des producteurs qui vend son vin au prix le plus élevé de la région (payé ~45$ en 2014), mais je n’aurais pas de problèmes à le placer auprès de ses confrères bourguignons du même prix, je suis certain qu’il s’en tirerait très bien.
Fritz Hasselbach du domaine Gunderloch a créé une deuxième marque annoncée comme 100% riesling 100% joy! Il est arrivé sur les tablettes de la SAQ via l’opération Top 100 du Wine Spectator puisqu’il s’y était classé en 54e position du palmarès de 2016. Je l’ai acheté à l’aveugle, puisque j’étais à la recherche d’un riesling d’entrée de gamme et celui-ci, disponible à la SAQ dans laquelle je me trouvais, semblait bien faire l’affaire.
Les raisins sont issus du vignoble de Roter Hang – qu’on peut traduire littéralement par colline rouge, de par la forte teneur en oxyde de fer du sol. La côte qui donne sur le Rhin, orientée sud, sud-est est semble-t’il assez reconnue pour la qualité du terroir. Ma connaissance des terroirs allemands étant extrêmement limitée, mais je semble lire que cette partie du vignoble au nord de la petite ville de Nierstein soit assez bien réputée.
Pour 16,95$, on ne demande pas la lune en terme de complexité. Le nez présente des notes d’ananas avec une pointe florale et légèrement réductive. Il s’agit d’un vin demi-sec, qui titre 34 g/L de sucre résiduel, comme on retrouve souvent en Allemagne. Ici par contre, pas d’indications sur l’étiquette qui auraient pu nous guider dans cette direction, il faut donc en tenir compte lorsqu’on l’ouvre à table. L’acidité importante permet de garder le tout en équilibre, même si la longueur en bouche n’est pas exceptionnelle. Il rendra de bons services en accompagnement de cuisine asiatique épicée et retiendrai probablement ses services lors d’une prochaine visite dans un restaurant apportez-votre-vin asiatique, comme on retrouve tant à Québec.
C’est une heure au nord-ouest d’Halifax qu’on retrouve la région viticole la plus à l’est de l’Amérique du Nord, la vallée de l’Annapolis. Ce petit coin de la Nouvelle-Écosse émerge sur la scène viticole mondiale depuis quelques années avec des vins blancs et des mousseux de grande qualité.
À marée haute, les vignes ont presque les pieds dans l’eau
Aujourd’hui, une vingtaine de producteurs se concentrent autour de Wolfville, là où la baie de Fundy devient le bassin de Minas. On est ici tout juste à la limite de la zone de maturation des vitis vinifera, les eaux de la baie venant tempérer le climat et allonger un peu la saison, permettant aux vignes de survivre en hiver et de repousser les épisodes de gel tout juste assez pour permettre aux raisins d’arriver à maturité.
Comptant aujourd’hui une vingtaine de producteurs, la région propose une offre particulièrement cohérente, organisée autour des mousseux et des vins blancs produits à partir d’assemblages de vitis vinifera et de cépages hybrides. On y retrouve bien quelques rouges, mais ce n’est pas avec quoi la région cherche à se démarquer.
L’appellation Tidal Bay a ainsi été mise sur pied en 2012 et une douzaine de domaines produisent maintenant un vin dans cette appellation. Ils mettent de l’avant l’acidité et la minéralité qui caractérisent la région, de même qu’un profil aromatique qui va de pair avec les fruits de mer, un choix logique pour un vin d’un climat maritime comme celui de la Nouvelle-Écosse. N’attendez pas un vin totalement sec, par contre, ils possèdent un peu de sucre résiduel qui vient arrondir un peu les angles.
Quelques producteurs à ne pas manquer
Benjamin Bridge est un des domaines qui a propulsé les bulles néo-écossaises sur la scène mondiale. Plantées à partir de 2001, dans la vallée de Gaspareau, légèrement plus chaude au printemps que les vignobles plantés directement à côté de la baie. À la tête de l’équipe, le Québécois Jean-Benoît Deslauriers s’est attiré des compliments d’un peu partout sur la planète, et pour cause.
Il s’agit du seul producteur néo-écossais dont les vins se retrouvent sur les tablettes de la SAQ. Pour une introduction au style de la maison, tentez de mettre la main sur le Brut 2009 ou 2011 ou optez pour la cuvée Réserve 2010 pour le passer en pirate dans une dégustation de champagnes.
Benjamin Bridge
Magnum de Pétillant Naturel 2016 dans les vignes
Plan des parcelles chez Benjamin Bridge
En plus de ces cuvées qui font l’orgueil de la maison, près de la moitié de la production est composée du Nova 7; cet assemblage à base de Muscat de New York, Vidal, Ortega et L’Acadie composant 11000 des 22000 caisses produites par le domaine. Légèrement pétillant, peu alcoolisé, très aromatique et avec un taux de sucre important, un peu à la manière d’un moscato d’Asti. Les amateurs de Nivole y trouveront chaussure à leur pied et les autres y prendront goût par une chaude journée l’été prochain.
Chez Lightfoot & Wolfville, on n’a pas lésiné sur les moyens pour accueillir les gens en grand, avec une magnifique salle de dégustation et boutique, donnant sur les vignes et des espaces pour accueillir des événements. La qualité de l’accueil rivalise avec la qualité et l’attention protée aux vins, produits en agriculture biodynamique.
On a pu goûter à des vins pleins de vie, typiquement néo-écossais et vachement bien faits. La production étant encore assez limitée, le meilleur moyen de mettre la main sur ces cuvées est de ce rendre sur place (ou de dire mille mercis à un ami qui va vous ramener une bouteille…!
Tous délicieux
Une salle de dégustation spectaculaire avec vue sur les vignes et la baie
Lightfoot & Wolfville
Ceux qui cherchent une couleur intense dans leur pinot passeront à côté d’un grand vin.
Chez Blomidon Estate Winery, le sympathique terrenevois d’origine Simon Rafuse a aussi fait des vins mousseux sa priorité. C’est chez eux que se retrouvent parmi les plus vieillies vignes de chardonnay, plantées au début des années 1980. Témoin de la force et de l’influence des marées, à marée haute, les vignes ont presque les pieds dans l’eau alors que celle-ci se retrouve à près de 100 mètres au large à marée basse! La cuvée tirée des vignes de l’Acadie est aussi particulièrement recommendable.
Certaines des plus vieilles vignes de Chardonnay de la Nouvelle-Écosse
Une superbe cuvée de bulles, à base de l’Acadie
Simon Rafuse, winemaker chez Blomidon Estate Winery
De ce côté de la baie, par rapport à la vallée de Gaspareau ou des environs de Wolfville, le printemps est un peu plus tardif, mais la saison se prolong en automne. “Un avantage” selon Simon Rafuse, “ça nous permet d’avoir des raisins qui mûrissent sans peu du gel sur une base plus régulière. J’échange volontiers une semaine au printemps contre deux à l’automne!”.
Pour s’y rendre
On doit compter une dizaines d’heure de route depuis Québec pour se rendre jusqu’à Wolfville. Selon le degré d’empressement, on pourra choisir de couper la route en deux et de coucher à St-Jean au Nouveau-Brunswick puis de prendre le traversier le lendemain matin. Sur place, planifier quelques jours pour faire le tour sans se prendre la tête, possiblement en combinant avec un saut de puce à Halifax, situé à une heure de route.
Les images nous provenant de Barcelone et des villes environnantes depuis dimanche dernier ne laissent personne indifférent. Dans ce contexte, je vais m’assurer de mettre les vins catalans tout au haut de ma liste d’achats.
La Plage!
Mestres Cava 1312
La maison Mestres sait comment faire du Cava, c’est de chez eux que vient le terme même Cava, créé en 1928, bien que le domaine cultive des raisins depuis le 14e siècle. La cuvée 1312, dont le nom reprend la date de fondation du domaine, a remporté le prix du meilleur mousseux à moins de 25$ du 6e Jugement de Montréal l’an dernier. Paralleda, Macabeu et Xarel-lo s’y allient pour produire un mousseux aux bulles fines, à la bouche qui conjugue la richesse d’un élevage de 18 mois en bouteilles – le double de l’élevage minimal préconisé par l’appellation – et une fraîcheur exemplaire. Difficile de trouver un meilleur mousseux pour les 20$ demandés.
Le Xarel-lo, en plus d’entrer dans l’élaboration des cavas, donne aussi de (très) bons vins tranquilles pour qui sait s’y attarder. Un nez à la fois floral et fruité, tout en équilibre et en délicatesse. En bouche, on a une bonne ampleur et une longueur qui impressionne. Si vous avez suivi la classification de Bill Zacharkiw dans The Gazette, il s’agit d’un vin qui entre clairement dans la catégorie des vins de texture.
Albet i Noya Xarel-Lo El Fanio 2016 – 12674221 – 21,60$ – Agent au Québec: Vintrinsec
Albet i Noya Xarel-Lo El Fanio 2016 (Photo: SAQ.com)
J’avais particulièrement aussi aimé les vins blancs du Priorat, avant et pendant mon voyage sur place en mai dernier. Surveillez le retour du Barranc dels Clossos de Mas Igneus sur les tablettes.
Parès Balta Mas Elena 2013
Du côté des rouges, je me tournerai sans hésitation du côté de Parès balta, qu’on connaît principalement pour ses bulles. Le domaine élabore aussi un assemblage bordelais composé de Merlot (50%) cabernet sauvignon et cabernet franc: le Mas Elena. Comme tous les vins du domaine, celui-ci est certifié biologique. Un vin qui mise sur le charme du merlot, avec tout juste ce qu’il faut de barrique pour lui apporter structure et complexité, tout just sous la barre des 20$.
Parès Balta Penedès Mas Elena 2013 – 10985763 – 19,85$ – Agent au Québec: Trialto
Parès Balta Mas Elena (Photo: SAQ.com)
Mas Martinet Cami Pesseroles 2012
Pour me gâter sans compter, c’est vers le Priorat que je me tournerais, en tentant de privilégier les vins issus de vignobles ancestraux, avec des vieilles vignes et une part importante de carignan. Le Cami Pesseroles de Mas Martinet fait partie de cette catégorie. Il s’agit d’un vignoble situé sur un ancien chemin reliant Gratallops et Porrera, deux villages en plein coeur de l’appellation. Le vin qui y est tiré par Sara Perez est à l’image de celle qui le fait, direct, sans compromis et transparent. Ce sont les fruits noirs qui dominent, les tanins prennent de la place mais le tout est gardé en équilibre par l’acidité naturelle qu’amène le terroir du Priorat.
Mas Martinet Cami Pesseroles 2012 – 12782097 – 88,00$ – Agent au Québec: Les vins Aldi
Lorsqu’on parle de vin mythiques, on a immédiatement en tête (avec raison), les grands crus de ce monde: Pétrus, Romanée-Conti, Opus One, Cheval Blanc, etc. Ces vins ont atteint le statut de mythe grâce à plusieurs années de faire le meilleur vin sur la planète. La culture populaire peut aussi faire passer un vin dans la catégorie des vins mythiques, pour des raisons évidemment complètement différentes.
C’est ainsi que lors de vacances récentes en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, j’ai eu l’occasion de mettre la main sur un de ces vins: le mythique Baby Duck – en magnum, s’il-vous-plaît! Il a été parmi les vins les plus populaires au Québec dans les années 1960 et 1970, mais n’est plus commercialisé par la SAQ depuis un bon moment. Je ne pouvais pas me permettre de passer à côté de la “chance” de goûter à cette bouteille.
N’écoutant que mon courage, j’ai servi cette bouteille à l’aveugle à l’apéro lors d’une dégustation organisée avec les collègues. On verse dans les verres et une mousse intense se forme par-dessus le vin, ne laissant présager rien de bon.
Baby Duck
Au nez, si vous ave une de l’expérience avec le jus de raisin Welch’s, vous ne serez pas dépaysé. C’est un nez malheureusement très intense et il est difficile de passer par-dessus. En bouche, ce sont principalement les 50 grammes par litre de sucre résiduel qui prennent toute la place. Les bulles pétillent comme une boisson gazeuse et tapissent la bouche. La sensation désagréable persiste encore beaucoup trop longtemps. Sur le bord de la piscine, l’été quand il fait (très) chaud, pour prendre avantage du fait que le vin ne titre que 7% d’alcool? Peut-être, mais on peut trouver des meilleures options en quelques secondes…
Bref, j’ai encore des amis au bureau, mais ils seront plus prudents à l’avenir lorsque je leur servirai un vin à l’aveugle. Ceci dit, je suis bien content d’avoir goûté à ce vin mythique, mais je n’ai pas l’intention d’essayer de récidiver bientôt. Si vous voulez faire l’expérience par vous-mêmes, ce vin est encore commercialisé en Ontario, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.