On a fait grand bruit du “retour” des vins à bas prix à la SAQ, certains chroniqueurs en ont fait leur cheval de bataille au cours des deux dernières années, tapant sur ce clou à chaque occasion possible. De mon côté, bien que je crois que le monopole doit offrir ce genre de vin pour satisfaire une certaine demande, ce n’est pas le genre de vin qui me passionne et je suis resté plutôt loin du débat.
Le Douglas Green Cabernet Sauvignon 2016 est un de ces vins nouvellement arrivé sur les tablettes pour combler un trou dans ce segment de prix. L’Afrique du Sud est un pays que je découvre avec de plus en plus d’intérêt au cours des derniers mois, avec notamment les jolis vins d’Adi Badenhorst (Sécateurs Rouge ou blanc ou le superbe The Drifter) et c’est avec une curiosité certaine que j’ouvre cette bouteille.
Douglas Green, un domaine dont l’histoire remonte à 1942 et fut un des premiers négociants en Afrique du Sud. Les vins créés par le domaine ont toujours été dans le registre fruité et facile à boire et, à la dégustation, on voit qu’ils n’ont pas dévié du style initial mis de l’avant par Douglas Green.
Dans le verre, pas de surprises, ni bonnes ni mauvaises. Le vin est moyennement corsé, significativement boisé (par l’utilisation de planches de chêne, selon la fiche technique du domaine), un peu court en bouche, mais pas déséquilibré. Selon mon palais, il manque un peu d’acidité pour qu’on ait vraiment envie d’en prendre un deuxième verre. Point positif, le vin est sec (que 4 g/L, selon le producteur), ceux qui sont sensibles au sucre résiduel et qui aiment ce style de vin moderne trouveront chaussure à leur pied.
Je l’accompagnerais d’une viande blanche grillée ou de pâtes avec une sauce ragù, où la viande prend une place plus importante que la tomate. C’est un style de vin qui plaira certainement à un large public et, en plus, est offert à un prix attractif autour de la barre des 10$.
Depuis l’année dernière, la SAQ mise à fond de train sur son programme SAQ Inspire pour toutes ses actions marketing. Les points bonis ont remplacé les rabais en argent sur les collerettes et les ventes à 10% seront bientôt remplacées par des offres de multiplication des points Inspire. Les points s’accumulent ainsi assez facilement, mais il est aussi facile pour un personne mal intentionnée d’utiliser les points d’autrui grâce à deux trous de sécurité majeurs.
Depuis quelques semaines, des rapports ont commencé à faire surface, notamment sur le forum fouduvin.ca (spécifiquement dans ce fil de discussion, mais les messages ont été supprimés par leur auteur depuis), que des détenteurs de la carte Inspire se sont fait frauder et ont vu leurs points disparaître du jour au lendemain. Pour certains, il s’agit d’une perte de plus d’une centaine de dollars. La SAQ mentionne avoir reçu les premières plaintes de ce genre à la fin-janvier.
Un des membre du forum a aussi rapporté avoir reçu un sondage par email promettant une récompense de 30 000 points. Après confirmation auprès du service à la clientèle de la SAQ, il a été confirmé qu’il s’agit d’une tentative d’hameçonnage. En observant le courriel d’un peu plus près, on remarque qu’il provient de saq@saqinspire.fr, ce qui aurait dû mettre la puce à l’oreille. On ignore pour l’instant comment son courriel personnel a pu être compromis, mais il confirme que ce n’est pas le même qu’il utilise pour Inspire, ce qui écarte un piratage de la base de données de la SAQ.
Il est aussi probable qu’un employé soit à la source d’une fuite d’un numéro de membre, puisque cette information (ainsi que le solde disponible) est affiché dans la caisse enregistreuse lors de la facturation. Cette méthode a même l’avantage de ne faire ressortir que les comptes qui ont un solde intéressant, contrairement au hameçonnage…
Or, une fois qu’une personne malveillante a en main un numéro de membre SAQ Inspire, c’est un jeu d’enfant d’utiliser les points. La manière la plus simple est d’ajouter le numéro dans l’application mobile de la SAQ. Mes tests ont montré qu’il n’y a aucune validation que la carte est bel et bien liée au compte enregistré dans l’application. Par la suite, on n’a qu’à se présenter en succursale et utiliser la version électronique de la carte pour passer à la caisse.
Il est aussi possible pour un employé d’entrer manuellement le numéro Inspire dans la caisse enregistreuse, lui donnant accès au solde de points au même titre que s’il venait de scanner la carte d’un client. Il n’est pas non plus impensable qu’un algorithme permettant de deviner des numéros de membre ait pu être mis au point, même si cette éventualité est plus improbable.
La récente attention médiatique sur ce problème a fait en sorte que les caissiers doivent maintenant demander une pièce d’identité pour toute transaction qui implique plus de 20 000 points (une valeur de 20$) et ce, depuis aujourd’hui. Avis aux couple qui utilisent chacun une carte, le compte SAQ ne possède l’information personnelle d’un de vous deux, il est possible que l’un d’entre vous ne puisse pas échanger vos points.
Il serait assez simple techniquement de régler les deux trous de sécurité mentionnés ci-haut. Dans le cas de l’application mobile, il suffirait de valider que le courriel attitré à la carte que l’utilisateur essaie d’ajouter est bel et bien liée au compte saq.com enregistré dans l’application et, éventuellement, redemander le mot de passe de ce compte. Une mise à jour de l’affichage aux caisses ne permettant pas de voir le numéro complet de la carte permettrait aussi d’éviter les fuites provenant de cette source.
La SAQ mentionne aussi qu’il n’est pas exclu que le système soit sécurisé par un NIP, ce qui ajouterait une couche de sécurité lors du retrait des points.
La langue anglaise a cette capacité de se prêter sans effort aux néologismes. Parmi ceux-ci, le joli Somewhereness, tiré de Making Sense of Wine, de Matt Kramer. Somewhereness, c’est ce qui nous permet d’identifier qu’un tel vin vient d’un tel endroit, qu’il a été fait dans des conditions particulières. C’est ce qui me rend heureux dans une bouteille de vin.
On ne peut pas faire semblant, avec l’esprit des lieux (somewhereness). On ne peut pas le fabriquer. En fait, on ne parvient même pas à en comprendre la source. Mais quand on goûte un vin qui l’exprime, on le sait tout de suite. – Matt Kramer, Making Sense of Wine.
C’est autour de ce terme porteur qu’une douzaine de vignerons de la péninsule du Niagara se sont regroupés afin de faire connaître leur région. Montrer ce qui rend cette région coincée entre le lac Ontario et le Niagara Escarpment unique. Montrer vers où une région somme toutes assez nouvelle sur l’échiquier mondial peut faire de mieux lorsque les meilleurs producteurs tirent dans la même direction, sans pour autant renier l’individualité de chaque domaine et l’unicité de chaque vignoble.
Ce groupe était à Québec en ce joli lundi de février, pour faire goûter l’esprit du Niagara aux sommelier et aux médias de Québec, avec, en prime, une dégustation à l’aveugle menée par la toujours aussi inspirante Véronique Rivest.
Au menu, une vague de riesling inspirants qui ont su combiner avec brio dans le même verre sucre et acidité, dans un impressionnant exercice d’équilibriste. Un joli tir groupé dans lequel le Cave Spring Riesling CSV 2010 s’est démarqué par sa complexité et sa grande buvabilité. Il s’agit du genre de vin qu’il est très difficile de recracher lors d’une dégustation… Même si les taux de sucre atteignaient jusqu’à 15 g/L (pour le Charles Baker Picone Vineyard 2013), on ne les goûtaient presque pas puisque le vin possède cette acidité qui garde la bouche bien vive.
Du côté des chardonnays, c’est la fraîcheur du climat que les vignerons mettent de l’avant dans le verre, dans un formidable tir groupé. Dans les trois verres, toujours un équilibre entre l’ampleur d’un chardonnay bien mûr, d’un élevage discret et bien maîtrisé et de la fraîcheur du climat ontarien. J’ai eu une faible préférence pour le County Chardonnay 2013 de Norman Hardie, qui avait un petit extra de vitalité, quoique le Saunders Vineyard 2013 de Bachelder et le Tête de Cuvée 2011 de Hidden Bench n’étaient pas loin derrière. En pirate dans cette vague, le Meursault Vieilles Vignes 2014 de Buisson-Charles, complétait la vague avec brio.
Du côté des pinots, le Pinot Noir Essence 2011 de 13th Street a su regarder le Savigny-lès-Beaune 1er Cru la Dominode 2013 de Pavelot droit dans les yeux, même s’il lui concède près de 15$ au niveau du prix. Présentés dans le salon qui a suivi la classe de maître, le Wismer-Parke 2014 et le Lowrey 2014 de Bachelder (deux vins vinifiés de manière rigoureusement identique) sont du genre à faire plier les genoux et valent amplement les 45$ demandés, lorsqu’ils arriveront en SAQ au courant du printemps. Surveillez les tablettes et demandez à votre conseiller d’en faire venir près de chez vous!
Les assemblages bordelais ont été ceux qui m’ont le plus laissé sur ma soif, car peu ont pu approcher l’élégance et le classicisme de la Réserve de Léoville Barton 2012, même si je serais curieux de revisiter le Stratus Red 2012 dans de nombreuses années, qui s’est présenté tout d’un bloc aujourd’hui (et qui ne me donnait pas beaucoup de plaisir, pour être bien franc, malgré de belles promesses).
La dégustation montre qu’ils se comparent sans complexe avec ce qui se fait de mieux sur la planète, au niveau du riesling et du chardonnay à tout le moins. J’en ressors en me demandant pourquoi je n’ai pas plus de vins ontariens en cave, un sentiment que j’éprouve rarement avec autant d’intensité en sortant d’une activité vinicole.
Dans la “vraie” vie, je travaille chez Jive Communications, une compagnie dont le siège social est situé à Orem, Utah, en plein coeur du pays mormon. Parmi mes collègues, plusieurs n’ont jamais pris une goutte d’alcool de leur vie, mais ça ne les empêche pas d’être curieux envers ma passion. Un d’eux m’a posé deux questions qui peuvent sembler toute simple à premier abord: “Pourquoi tu aimes le vin? Et c’est quoi un bon vin pour toi?”
Parce que le vin, c’est un aliment délicieux. Un aliment, au même titre qu’une carotte, un steak ou un bon dessert. C’est à table que le vin prend tout son sens et, en dehors des contextes “artificiels” comme une dégustation technique ou une visite chez un producteur, c’est là que j’en tire le plus de plaisir. Un repas sans vin est comme une journée sans soleil…
Parce que le vin, c’est le voyage.Rares sont les breuvages qui peuvent aussi bien transmettre le temps et le lieu précis d’où ils sont issus. On entend souvent dire qu’on ne fait pas de bon vin dans des endroits laids et mon expérience de voyage tend à accréditer cette hypothèse.
Ouvrir une bouteille, c’est se rendre virtuellement dans les terrasses sur les flancs du Douro, dans le brouillard matinal des collines piémontaises, sentir la chaleur qui gorge le raisin sicilien, regarder le lac Ontario depuis le Bench du Niagara ou Prince Edward County.
En plus, si c’est une région qu’on a déjà visité, ouvrir la bouteille de vin permet de se replonger brièvement dans ces souvenirs, de repartir vers le large pour pas mal moins cher qu’un billet d’avion.
La totale vient lorsque le vin réussit à exprimer tout le contexte d’où il vient. Non seulement le lieu géographique, mais aussi les conditions climatiques qui ont bercé le raisin et la marque culturelle de ceux qui ont transformé le raisin en vin. Le terroir qui ne veut peut-être pas dire grand-chose pour certains ou qui ne se relie pas à des concepts précis, mais le fait que le même raisin, cultivé en deux endroits sur la planète goûte systématiquement différent me fascine.
François Morissette
Francesco Ricasoli and Brolio Rosso 1927
Deirdre Heekin chez La Garagista
Stéphane Ferreira, Quinta da Pôpa
Ethan Joseph, winemaker chez Shelburne Vineyard
Francesco Visani – Antinori
Francisco Olazabal à Vale Me?o
Mais, au-delà de tout ça, le vin c’est un moment de rencontre. Mon plus grand plaisir vinicole est d’ouvrir une bouteille qui m’est importante avec des amis qui vont l’apprécier à sa juste valeur (vous savez qui vous êtes!). Rencontre avec les producteurs, que ce soit en visite chez eux ou lors d’événements proches de la maison, merci d’être aussi disponibles et généreux.
C’est dans le partage que le vin prend tout son sens et sans ce partage, le plaisir ne peut jamais être entier.
Je ne pensais pas commencer mon année avec deux articles à saveur économique dans un espace de temps rapproché, mais la récente baisse de prix de 0,40$ sur près de 1600 produits par la SAQ m’incite à regarder les chiffres de nouveau. Pour ceux qui ont manqué la première partie ou je décris un peu plus en détail lest indicateurs ainsi que la méthodologie utilisée, rendez-vous ici!
Lors de cette acquisition de données, effectuée le 11 janvier dernier, on a pu trouver 1322 vins et spiritueux qui étaient communs entre les deux monopoles, en augmentation par rapport à 1295 à la fin de 2016. J’ai aussi corrigé quelques faux positifs, qui pouvaient être facilement repérés à cause de leur différence de prix énorme.
Comparaison générale des prix
On peut voir directement l’effet de la baisse de prix récente de la SAQ sur le nombre de produits qui sont moins cher à la LCBO. Si on regarde l’ensemble des produits communs, on approche d’une répartition égale.
Si on regarde les données acquises en décembre 2016, il y a 106 produits où l’avantage était à moins de 0.40$ pour la LCBO. Ceux-ci n’étaient pas tous visés par la baisse de prix récente, mais il y en a eu assez pour faire passer le pourcentage total de produits moins cher à la LCBO de 57% à 51%. Pour les vins, c’est une diminution de près de 8 points de pourcentage dans l’avantage de la LCBO. Si on se projette dans l’avenir, il y a présentement 149 produits qui ont une différence de moins de 0.50$ en faveur de la LCBO, on pourrait donc envisager des changements dans cet indicateur si le monopole québécois continue sur cette tendance.
Toutefois, si on regarde la valeur absolue de la différence de prix, celle-ci n’a pas bougé aussi dramatiquement. En effet, le ratio des prix pratiqués par la SAQ sur ceux de la LCBO est passé de 103.38% à 103.32%. C’était à prévoir puisque la baisse de 0.40$ ne touchait qu’environ 15% du catalogue total de la SAQ et ne visait pas nécessairement les vins qui avaient une grande différence de prix mais plutôt les vins qui se vendent le plus.
Comparaison par catégorie de prix
Lorsqu’on compare par catégorie de prix et de produits, on remarque que la domination de la SAQ au niveau des spiritueux se poursuit, tandis qu’au niveau des vins, le portrait n’a pas beaucoup changé non plus. Dans cette catégorie, le point d’équilibre est atteint dans la catégorie entre 30 et 40$.
Au niveau des produits à moins de 10$, tant au niveau des vins que des spiritueux, la catégorie est biaisée par des produits qui sont listés comme étant discontinués dans le catalogue de la LCBO, mais dont il reste quelques bouteilles en inventaire (du moins, selon leur site). Ces produits ont fait l’objet d’une vente de liquidation et c’est le prix de la LCBO qui est utilisé pour établir les catégories de prix. J’ai délibérément choisi de laisser en place ces produits puisqu’ils étaient inclus lors de ma dernière analyse, mais je pense bien que je devrai réviser ce choix pour le futur.
Nombre de produits
Moyenne de SAQ – LCBO
Moyenne du ratio (SAQ/LCBO)
Spiritueux
-10$
11
$3.98
143.10%
10-15
11
$0.61
107.06%
15-20
24
$0.01
99.89%
20-25
13
$0.37
101.84%
25-30
99
-$0.96
96.44%
30-40
89
-$1.17
97.12%
40-50
58
-$0.42
99.22%
50-75
65
-$1.05
98.35%
75-100
49
-$4.24
95.39%
100+$
63
-$15.35
94.86%
Total Spiritueux
482
-$2.93
98.47%
Vins
-10$
48
$2.43
130.01%
10-15
197
$1.31
110.04%
15-20
245
$1.09
106.13%
20-25
94
$0.91
104.03%
25-30
62
$0.72
102.73%
30-40
46
-$0.04
99.68%
40-50
32
-$0.28
99.52%
50-75
48
-$3.21
95.11%
75-100
25
-$2.65
97.03%
100+$
43
$12.81
99.98%
Total Vins
840
$1.30
106.11%
Grand Total
1322
-$0.24
103.32%
Valeur monétaire de la différence
Là où la baisse de prix de la SAQ paraît le plus, c’est lorsque je calcule la différence de prix multipliée par l’inventaire que me retourne LCBOapi.
Si vous avez suivi depuis la dernière fois, cet indicateur était à 1.7 M$ en faveur de la LCBO alors qu’il est maintenant 1.6 M$ en faveur de la SAQ. La principale différence vient des vins, qui comptent à eux seuls pour 2 M$ de cette différence.
Nombre de produits
Somme of Différence (SAQ-LCBO) * Inventaire
Bière
35
$140,721.95
Cidres
2
-$804.10
Prêts-à-boire
11
$6,027.30
Spiritueux
482
-$3,738,540.23
Vins
840
$1,972,192.41
Grand Total
1370
-$1,620,402.67
Comme cet indicateur est un essai de refléter le volume de vente et qu’il est difficilement reliable à quelque chose sur le terrain, je ne sais trop comment il va se comporter à long terme. Cette différence est donc à prendre avec un grain de sel, mais semble indiquer que la SAQ a bel et bien visé les produits qui se vendaient le plus lors de sa récente baisse de prix.